Il y a cent ans, à Varsovie, naissait Mieczyslaw Weinberg, dont le destin douloureux pourrait résumer à lui seul les souffrances du siècle. Des violences endurées par la communauté juive est-européenne, en effet, il connut tout. En Pologne, d’abord, faisant face au ghetto, à la guerre, et à la mort brutale de tous les siens. En Russie, ensuite, où il poursuivra son inexorable chemin de croix, subissant les brimades du gouvernement communiste, l’injustice des procès truqués et la prison. Seule lumière dans cette nuit perpétuelle, l’amitié fidèle de quelques grandes figures, comme celle de Chostakovitch qui le soutint sa vie durant.
Malgré les aléas d’un sort contraire, Weinberg a constamment opposé à l’acharnement des forces destructrices la liberté inaltérable et salvatrice de l’acte créateur. Ainsi, son œuvre protéiforme pourrait se présenter comme une vaste entreprise souterraine de résistance. Stylistiquement, on y perçoit le désordre d’une existence morcelée, au travers un art consommé de la fragmentation et du « collage ». On y entend, également, le même recours aux airs populaires que chez Chostakovitch, la même précision incisive dans le phrasé, le même souffle dramatique – bien que le varsovien se révèle plus foncièrement lyrique et moins grinçant que son collègue moscovite.
Pour commémorer le centenaire de la naissance de cette immense figure, Gidon Kremer propose de le replacer dans son contexte, de donner à entendre sa musique, et à contempler son destin, que notre actualité la plus brûlante rejoint tragiquement, en bien des points. Nous entendrons donc des œuvres de Chostakovitch ; puis, les notes de Weinberg dialogueront avec les images d’un cercle d’artistes russes contemporains, proches du cinéaste Kirill Serebrennikov.
Le Petit Paradis antiformaliste / Dimitri Chostakovich
Chronicle of Current Events / Mieczysław Weinberg
Ferme-Asile
Promenade des Pêcheurs 10
1950 Sion
Suisse